Voyager en famille

Les fameuses chutes d’Iguazu se trouvent à la frontière de 3 pays : le Brésil,  l’Argentine et le Paraguay. Ici, les chauffeurs de taxis et les vendeurs jonglent constamment dans leurs têtes avec les 3 taux de change,  plus le dollar américain qui est toujours une devise pratique à garder dans sa bourse.

Pour quitter Iguazu et se rendre à Buenos Aires, c’est 20 heures d’autobus, pour 100 à 120 dollars par personne. En fouillant sur le net, j’ai lu sur un blogue que l’on pouvait sauver quelques piastres en prenant le bus du Paraguay, dans la ville frontalière de Ciudad del Este. Personne ne va à Ciudad del Este, sauf pour une raison: acheter de l’électronique. Durant la semaine,  nous avons nous-mêmes traversé au Paraguay pour acheter quelques bidules.  C’est un jeu d’enfant: ni le Brésil ni le Paraguay n’exercent de contrôle sur les consommateurs qui traversent la frontière allègrement. Il me semblait donc une bonne idée de prendre le bus de Ciudad del Este pour Buenos Aires afin de faire des économies. Erreur…

Le Paraguay: plus facile d’y entrer que d’en sortir!

En arrivant aux douanes du Paraguay, je montre les passeports et les billets d’autobus. Ah , désolé mon cher monsieur mais les Canadiens doivent avoir un visa pour entrer au pays. Quoi?? C’était pas écrit ça sur le site qui m’assurait que j’allais sauver quelques sous… Combien le visa? 160 US par personne…. Calcul rapide, mes billets d’autobus viennent de monter de 800 dollars. De plus, il faut que j’aille chercher mon visa au consulat canadien et le bus part dans deux heures! Je regarde le douanier, incrédule. Il doit bien y avoir une autre solution?  Je quitte le Paraguay dans 2 heures, donnez-moi une chance! Non , y a pas d’autres solutions, désolé. Devant mon insistance, le douanier finit par m’offrir une autre option: Pour m’aider, il peut me faire un visa de transit, ici – même, pour 250$US pour la famille. La belle affaire… Puis , je me dis qu’au moins on n’aura pas tout perdu. Ok, j’accepte.

Évidemment ils ne prennent pas la carte de crédit alors je cours au centre d’achats le plus près chercher l’argent.  Après quelques essais infructueux au guichet, je parviens finalement à retirer l’argent.

Autre course, vers les douanes. J’ai chaud, je suis trempé, je me sacre après pour avoir eu la brillante idée de prendre le bus du Paraguay…

Je donne 260 dollars au douanier, il me regarde tout penaud:

– Je n’ai pas de change, désolé.

– Donne-moi le change en guarani, que je lui lance.

Ce n’est pas la première fois qu’on me la fait celle-là…  Il me donne le change, étampe tous les passeports et nous laisse aller au terminus d’autobus.  A ce moment-là, je ne suis pas de bonne humeur, mais j’essaye de penser à autre chose, croyant que ce mauvais épisode est terminé.  Je ne suis pas au bout de mes peines…

Le bus part à 16h00 comme prévu.  Après 5 heures de route, nous arrivons à la frontière Paraguay-Argentine.  Le chauffeur prend les passeports de tous et les amène aux douaniers paraguayens.  Après quelques minutes un douanier entre dans le bus et appelle mon nom.  Bon, qu’est-ce qu’ils vont encore me demander??Je suis le douanier dans le bureau.

« Tu n’as pas de visa pour être au pays », qu’il me dit. « Tu dois retourner à Ciudad del Este. »

Quoi?  Je suis en furie.  Je lui explique toutes les procédures prises avant le départ, je lui montre le visa de transit dans les passeports.  Il s’en fout, cela n’a aucune valeur pour lui.  Je répète mon histoire, lui raconte comment je viens de payer 250 dollars pour ce visa de transit, comment je vais perdre mes billets de bus pour Buenos Aires, rien n’y fait.  Tout ça se passe en espagnol, évidemment, mais la colère me rend très volubile. Il m’écoute, réplique à chacun de mes arguments.  Frustré, je demande quien es el chef aqui?? – qui est le chef ici??  Ca tombe mal, c’est lui, qu’il me dit…  Après un bon 15 minutes il se lasse:

– Viens dans l’autobus avec moi, nous allons débarquer tes affaires, tu repars pour Ciudad del Este.

– Non, que je lui réponds sèchement.

– Comment non?

Il est complètement pantois.

– Non, je ne retourne pas à mon point de départ. Dejeme salir del pais! – Laissez-moi sortir du pays!  Je n’ai jamais voulu y rentrer, je veux en sortir!

Le monsieur il n’est pas très content.  Ses collègues nous écoutent depuis le début et n’ont pas dit un mot.  Lui, il me regarde et je vois qu’il ne sait pas quoi faire de moi.  Je le regarde aussi et je me demande s’il ne va pas appeler la police pour me faire sortir du bus.  C’est assez étrange comme situation, nous sommes tous les deux à bout de nerf à ce moment-là.  Il y a un long silence, puis je lui explique, plus calmement, que je fais le tour du monde, que j’ai trois jeunes enfants avec moi, que ça fait près de 3 mois qu’on est sur la route et qu’il est hors de question que je rebrousse chemin. Un collègue se lève, va parler à mon douanier dans l’oreille, et je sens que la partie est gagnée.  Il va me laisser passer.

Remplacez ‘United States’ par Paraguay 🙂

Le douanier prend mes 5 passeports et sort prendre une marche.  J’attends.  Je le vois à travers la fenêtre et il m’apparaît clair qu’il est allé prendre l’air pour se calmer.  Finalement il revient et me regarde dans les yeux, étampe mes passeports un à un, et me répète à chaque fois qu’il me fait une GROSSE faveur…  Tout ce que je trouve à dire après chaque étampe c’est un timide « gracias senor », sans sourire, mais à l’intérieur je jubile…  Je suis content d’avoir tenu mon bout, et je suis pas mal fier de mon espagnol aussi!

mariachi-helps-to-speak-Spanish

 

Nous avons finalement pu sortir du Paraguay et sommes maintenant en Argentine jusqu’à la mi-novembre.  Les péripéties de voyage c’est toujours comique après coup, mais j’espère qu’il n’y en aura pas trop d’autres comme celle-là!

10 commentaires on “On a failli rester pris au Paraguay!

  • Eh bien, content de savoir que ca s’est bien terminé. Suis impressionné mais pas surpris de ton aplomb et de ton nerf: ca me rappelle vaguement nos confrontations à l’intérieur de notre équipe de coaching! À l’image de ton douanier, combien de fois ai-je plié en te faisant moi aussi une GROSSE faveur!

    • Haha, je vais le prendre comme un compliment JF! Je t’envoie un courriel en privé pour savoir comment se déroule la saison cette année.

  • Salut la petite famille! Super article et bien des péripéties!!! Je suis d’accord avec toi pour dire que ces aventures sont drôles à conter par la suite mais sur le coup ça semble le comble. Continuez de vous amuser et de profiter de cette liberté qui semble s’estomper au retour! Savourez chaque moment!
    La famille MAJIVIN 🙂

  • Aille ya yaille !!! Quelle histoire … J’avais commencé hier à la lire et j’avais hâte de connaître la suite! Bravo Éric pour ton espagnol et ta persistance !!! Xxx

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